La boucle de lâAltaĂŻ â via le lac Teletskoye
Retour en Russie, en AltaĂŻ, avec la suite de lâarticle dĂ©diĂ© Ă Ride NâBe, pas de poisson cru cette fois mais des paysages magnifiques dont le Katu-Yaryk, lâune des routes les plus « challenging » au Monde !
Jâai organisĂ© ma logistique moto sur place. Il ne me reste plus quâĂ prendre le guidon. Mon premier fil conducteur est la riviĂšre Katun. Elle prend sa source depuis les glaciers posĂ©s sur les flancs du mont Beloukha (4.506 m dâaltitude). Marquant la frontiĂšre entre Russie et Kazakhstan, câest le plus haut sommet de SibĂ©rie. La Katun longe ici lâunique route asphaltĂ©e qui file jusquâen Mongolie : la «Chuysky Trakt» ou route de la TchouĂŻa. Cette route fut lâun des tracĂ©s de la Route de la Soie. En effet, la rĂ©publique de lâAltaĂŻ partage ses frontiĂšres avec le Kazakhstan au Sud-Ouest, la Chine sur sa pointe Sud et la Mongolie, plus Ă lâEst. Le lieu Ă©tait donc propice pour lâĂ©tablissement des Ă©changes commerciaux. Mais la gĂ©ographie escarpĂ©e nâa pas facilitĂ© les choses. Une aubaine pour la nature qui, aujourdâhui encore, est magnifiquement prĂ©servĂ©e. Un chemin de croix pour les prisonniers et autres travailleurs, envoyĂ©s ici pour construire une route accessible aux voitures.
Le tronçon historique court depuis Biisk (kilomĂštre 0, au musĂ©e dĂ©diĂ© Ă son histoire), jusquâĂ la frontiĂšre mongole, sur 613 km. Câest un itinĂ©raire splendide, ponctuĂ© de forĂȘts, de cascades, de riviĂšres, de cimes enneigĂ©es⊠La route serpente entre les montagnes et joue avec les reliefs. Pas Ă©tonnant que lâAltaĂŻ soit inscrit au patrimoine mondial de lâUNSECO, parmi les 11 merveilles naturelles de la Russie. Le revers de la mĂ©daille : une activitĂ© touristique qui gagne du terrain. Heureusement, de nombreuses rĂ©serves sont protĂ©gĂ©es.
Pour Ă©chapper Ă ce flux de visiteurs, principalement concentrĂ© autour de la route asphaltĂ©e, il est facile de sâĂ©loigner Ă moto, par les nombreuses pistes qui tentaculent, parfois sans but prĂ©cis. Ă plusieurs reprises je mây aventure, tantĂŽt dans lâunique espoir de dĂ©nicher des vieux ponts de bois, ou bien pour aller Ă la rencontre des habitants des villages reculĂ©s. Lors dâune de ces virĂ©es improvisĂ©es, jâai fait la connaissance de Vecha, un shaman avec qui je suis toujours en contact.
Je fais escale au col Seminskiy (1.717m dâaltitude). IndiquĂ© comme un point dâintĂ©rĂȘt, ce lieu nâa rien dâattrayant. Des petites baraques de souvenirs sont installĂ©es. On peut y boire un cafĂ© ou grignoter un morceau. NĂ©anmoins, câest un trĂšs bon spot pour faire des achats souvenirs Ă des prix intĂ©ressants. JâapprĂ©cie particuliĂšrement les vĂȘtements chauds, trĂšs utiles pour les motards « toutes saisons ». Je nĂ©gocie le tarif, avec des marchands toujours ravis de faire des affaires.
Je continue ma route. Je passe la vallĂ©e de Karakol, connue pour sa montagne à «3 tĂȘtes», lieu de culte local, qui relie notre monde au monde supĂ©rieur. Plus au sud, en direction du village de Bichiktu-Boom, traduit par «Rochers avec inscriptions», se trouve une concentration de pĂ©troglyphes. Jâarrive jusquâau col Chike-Taman (1.460m). Le point de vue est superbe et le tracĂ© pour sây rendre, tout autant. Quelques clichĂ©s et je trace.
Je retrouve la Katun et son bleu glacĂ© si caractĂ©ristique. Juste aprĂšs le village dâInya, je me pose un instant pour admirer le spectacle sur lâembranchement de la Katun et de la riviĂšre Chuya. Câest elle qui sera ma guide dĂ©sormais. Plus on sâapproche de la Mongolie et plus le paysage devient minĂ©ral. PerchĂ© sur «Mars», lâhorizon sâouvre Ă 360°. Dâici, la Mongolie nâest plus quâĂ 100 km. Et le paysage parle de lui-mĂȘme : une Ă©tendue semi-dĂ©sertique, dâoĂč son nom «Mars», qui annonce les steppes Ă perte de vue. La terre joue des plus belles couleurs, entre ocre, rouille ou nacre⊠Ce site attire beaucoup de touristes. Je bifurque sur une piste plus Ă lâEst, pour prendre de la hauteur. LĂ -haut, câest le calme. Et lâon profite du panorama dans son intĂ©gralitĂ©.
Je nâirai pas plus Ă lâEst. Car la prochaine Ă©tape, câest le « Katu-Yaryk » !
Pour y accĂ©der, il faut rouler jusquâau village dâAktash. Ici, tu quittes la Chuysky Trackt, en prenant la direction du Nord. LâidĂ©al est de faire le plein dâessence Ă Aktash. La prochaine station se trouve Ă Ulagan, Ă 60 km. Globalement, les stations-service sont prĂ©sentes Ă travers toute la rĂ©gion. Mais il est prĂ©fĂ©rable dâassurer ses arriĂšres, car nombreuses sont les zones oĂč le rĂ©seau tĂ©lĂ©phonique est rĂ©duit Ă nĂ©ant. En cas de pĂ©pin, ça peut vite devenir problĂ©matique. Une dizaine de kilomĂštres et lâasphalte nâest plus quâun lointain souvenir : quel bonheur !
La «Red Gate», Ă©troit petit canyon aux teintes rougeĂątres, marque le dĂ©but de lâaventure. La piste ondule au milieu dâune multitude de lacs. Les berges du Kidelyu offre une halte idĂ©ale pour un dĂ©jeuner. Une cabane, ouverte en saison, propose des collations locales. Lâasphalte a refait surface, mais pour une courte durĂ©e. Jâarrive au village dâUlagan. Ici, je fais le plein : nourriture, essence. 45 km de pistes, avec plusieurs arrĂȘts pour profiter des paysages ou des curiositĂ©s rencontrĂ©es. Et enfin, le voilĂ ! Le Katu-Yaryk. RĂ©putĂ©e lâune des routes les plus challenging au Monde, elle serpente dans le vide sur 3,5 km, via 9 Ă©pingles, et 800 m de dĂ©nivelĂ©. En bas, coule la riviĂšre Chulyshman, donnant son nom Ă cette superbe vallĂ©e. Depuis un mirador improvisĂ© sur un rocher dressĂ© au-dessus du vide, jâexulte. Jâobserve cette trace qui dĂ©fie les lois de la gravitĂ© et quâil va falloir aborder avec la plus grande dĂ©licatesse. Le temps sâest arrĂȘtĂ©.
Je suis restĂ©e en observation presque hypnotique face Ă ce panorama. Le soleil qui sâenfuit, jâentame la descente. En 1Ăšre vitesse, mâaidant du frein Ă moteur. Je ne peux mâempĂȘcher de crier dans mon casque pour Ă©vacuer mes Ă©motions. Le cĂŽtĂ© «girly» peut-ĂȘtre ! PurĂ©e, quel pied ! Par temps sec, avec une vitesse adaptĂ©e, tout se passe bien. Les gravillons roulent et font doucement glisser les pneus pour te rappeler quâil faut garder lâoption prudence. Des carcasses de voitures tĂ©moignent de lâinfortune de quelques tĂ©mĂ©raires. JâĂ©prouve une joie Ă©vidente en arrivant Ă bout de ce gĂ©ant.
Je passe la nuit dans un camp de base, logĂ©e dans un petit chalet de bois. Les toilettes, câest la cabane au fond du jardin. Et la douche, câest le bagna (sauna russe). Rien de tel pour faire du bien au corps quâune sĂ©ance au bagna, ponctuĂ© de baignade dans la riviĂšre. Enfin, le barbecue sous un ciel Ă©toilĂ©, animĂ© par les copains russes. Le programme parfait, nâest-ce pas ?
Au petit matin, je dĂ©couvre la beautĂ© de cet endroit. AbsorbĂ©e par le stress lors de la descente, la veille, je nâavais pas mesurĂ© la grĂące de cet endroit. La piste continue jusquâau lac Teletskoye. Alors, câest parti !
Un stop aux «Gribby». Je quitte la moto pour une randonnĂ©e dâune bonne heure. Ăa monte, sur un terrain escarpĂ©, pour accĂ©der Ă ses formations rocheuses qui ressemblent Ă des champignons (gribby, en russe). Cette excursion qui mettra Ă mal mes facultĂ©s physiques en valait la peine : la perspective sur la vallĂ©e est grandiose.
Il me reste 50 km Ă parcourir. La piste se fait de plus en plus technique Ă lâapproche du «Petit BaĂŻkal de lâAltaï». ArrivĂ©e sur place, le camp de base dans lequel je mâinstalle est encore plus rudimentaire que le prĂ©cĂ©dent. Peu importe, le minimum sera dĂ©jĂ un luxe. Le feu de camp Ă©tabli, la soirĂ©e dĂ©file, toujours trop vite, quand on passe un agrĂ©able momentâŠ
Pour regagner le Nord du lac, une seule solution : par bateau. Il existe un bac qui relie les deux extrĂ©mitĂ©s du Teletskoye, pendant la saison. Il faut cependant rĂ©server Ă lâavance, et les traversĂ©es ne sont pas systĂ©matiques. Le bac part depuis Iogach ou Artybash, au Nord, et seulement lorsquâil est plein. Le systĂšme D, quand on est Ă moto, câest de faire appel Ă un pĂȘcheur du coin. Lors dâune virĂ©e en AltaĂŻ avec mes amis russes, nous avions optĂ© pour cette solution. Notre convoi Ă©tait composĂ© dâun quad et de deux voitures. Nous avions chargĂ© le quad sur le bateau, en route pour une traversĂ©e de 78 km et 8h, au son bruyant du moteur et aux effluves de retours dâĂ©chappement. Les autres avaient rebroussĂ© chemin, seule alternative quand on ne peut pas traverser le lac : 700 km par la route, pour rallier Artybash. Jâavais optĂ© pour les gaz dâĂ©chappement ! Notre expĂ©dition nâen fut pas moins merveilleuse, car le lac est un petit bijou. Le pĂȘcheur, amical, nous fit faire plusieurs haltes pour aller Ă la rencontre de ses amis, ou encore dĂ©couvrir la plus grande cascade qui borde de lac.
DĂ©barquĂ©e Ă Artybash, je retrouve lâasphalte pour rider sur une petite route dĂ©partementale jusquâĂ Gorno-AltaĂŻsk.
Le pĂ©riple est loin dâĂȘtre terminĂ©. Les dĂ©couvertes sont encore nombreuses et le plus intĂ©ressant est Ă venir. La rĂ©publique de lâAltaĂŻ recĂšle tellement de joyaux insoupçonnĂ©s.
Cette expĂ©rience en AltaĂŻ, et bien dâautres encore, ont permis Ă Laurie de crĂ©er Ride NâBe, une agence de voyage qui vous emmĂšne vers lâEst, Ă la dĂ©couverte de la Russie, mais aussi de la Mongolie, Roumanie, …
Pour plus de renseignements, rendez-vous sur le site « www.ridenbe.com » ou contactez Laurie par mail Ă lâadresse :
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ou par téléphone au 06 43 28 11 65
Texte et photos : Ride NâBe
Suggestion de lecture par Ride NâBe :
– « Ici, la distance entre vos pensĂ©es et le ciel est infime » đ